Hongrie : la jeunesse s’exprime contre Viktor Orbán, entre musique et politique

Monde

La contestation s’invite sur les scènes et les festivals

En Hongrie, la protestation ne se limite plus aux défilés traditionnels des opposants : elle gagne les festivals et les concerts, où musique et politique se croisent.

Pour Armin, étudiant en économie de 24 ans, ces cris traduisent un mécontentement concret. « Tout est de plus en plus cher, il y a une énorme inflation. Et puis, la politique du gouvernement contre les personnes LGBT+ , et sa politique étrangère, c’est terrible. Notre gouvernement est pro-russe, et il y a énormément de gens qui ne sont pas d’accord avec ça », confie-t-il mardi dans l’émission Tout un monde de la RTS.

La musique comme tribune politique

La contestation s’affirme aussi lorsque des artistes s’emparent publiquement du sujet autour de Viktor Orbán. Dans son dernier morceau, le chanteur Majka offre une satire féroce du régime en décrivant un pays fictif, le Bindjistan, dirigé par un autocrate corrompu. « Je survis à tout, car les lois sont écrites pour moi », chante-t-il.

À Szeged, dans le sud du pays, le concert s’est terminé par le cri collectif « Salaud de Fidesz ! », repris par des centaines de festivaliers.

Des textes incisifs et des concerts marquants

Une rébellion consciente

Pour Kata, jeune styliste, le mouvement ne se réduit pas à une simple explosion de colère mais témoigne d’une prise de conscience : « Il ne faut pas voir ça comme un slogan primitif, dans le style des hooligans qui hurlent pendant les matches de foot. Non, c’est un sentiment de rébellion. »

Viktor Orbán est au pouvoir depuis près de 16 ans. Lui et son parti se présentent comme anti-establishment, alors qu’ils font partie de l’élite économique et politique du pays, rappelle le politologue Matyas Bodi dans nos échanges.

Dans plusieurs pays européens, l’extrême droite attire une part croissante de la jeunesse. Mais, selon M. Bodi, ce n’est pas le cas en Hongrie : « Le Pen, l’AFD en Allemagne, Vox en Espagne… tous ces partis sont très populaires auprès des jeunes. Mais ils sont tous dans l’opposition. Viktor Orbán est au pouvoir depuis bientôt 16 ans. Lui et son parti se présentent comme anti-establishment, alors qu’ils font partie de l’élite économique et politique du pays », explique-t-il au micro de la RTS.

Espoir mesuré pour le scrutin de 2026

À sept mois des législatives, l’espoir d’un changement reste mesuré. Armin et d’autres jeunes envisagent parfois l’émigration comme option, tout en restant conscients que le vote à venir n’assure pas une alternance, d’autant que le gouvernement bénéficie d’un empire médiatique. « C’est difficile de battre le parti au pouvoir. Car il y a encore beaucoup d’électeurs qui ne voient pas la réalité. Ils pensent qu’ils vivent mieux maintenant que sous le communisme, et ils ont peur du changement », estime-t-il.

Kata, elle, croit en une dynamique de changement. Elle milite activement pour le nouveau parti d’opposition Tisza, qui mène les sondages. Ce mouvement est fondé par Péter Magyar, ancien cadre du régime qui a rompu avec le parti d’Orban et qui vise à restaurer la démocratie.

Selon une enquête du début septembre réalisée par Median, 37 % des électeurs pourraient voter pour le Tisza et 30 % pour le Fidesz; seuls 15 % des moins de 30 ans voteraient Fidesz, tandis que 56 % seraient prêts à accorder leur bulletin au Tisza.

La jeunesse hongroise oscille entre colère et espoir et pourrait peser sur l’orientation politique du pays dans les mois qui viennent.