Contexte économique et tensions sur le secteur viticole
Les professionnels de la vigne font face à une situation financière délicate. Dans de nombreuses exploitations, les coûts de production dépassent le revenu généré, et les vendanges se réalisent fréquemment à perte. Les caves accumulent des bouteilles invendues, faute de débouchés suffisants.
Trois facteurs expliquent en grande partie cette situation complexe : une diminution de la demande de vins suisses, notamment chez les jeunes consommateurs, la concurrence accrue des vins étrangers et les aléas climatiques qui renchérissent le coût du travail à la vigne.
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Regards et témoignages sur la rentabilité et la compétitivité
À Blonay (VD), le vigneron François Montet décrit une année marquée par un paradoxe: une qualité et une maturité du raisin « magnifiques » après une série de millésimes sans défaut. Mais il constate aussi une surproduction mondiale par rapport à la demande, ce qui pousse certains acteurs à privilégier l’export, notamment vers la Suisse. Les importateurs investissent par ailleurs dans des actions de promotion soutenues pour les vins étrangers.
« Financièrement, c’est un zéro pointé. Il y a un risque que certaines exploitations mettent la clé sous le paillasson », résume-t-il, en sa qualité de président de la fédération vigneronne vaudoise.
Le moral des professionnels est largement touché. Olivier Mark, à la tête de l’interprofession du vin vaudou, affirme n’avoir jamais vu autant d’inquiétude parmi les vignerons. Mathias Delaloye, président de la Chambre valaisanne d’agriculture, parle même de risques de difficultés économiques, voire humaines, pour certaines exploitations.
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Réponses possibles et mutations du vignoble
Sur le terrain, certains viticulteurs abandonnent déjà certaines parcelles. Pour stabiliser le marché, des restructurations pourraient passer par l’arrachage de portions de vignes, surtout lorsque les parcelles sont difficiles d’accès, proches de milieux naturels ou peu rentables à entretenir. François Montet rappelle que ce type de démarche est une pratique observée dans d’autres pays et qu’elle pourrait devenir plus fréquente dans le canton de Vaud, même si le sujet reste encore quelque peu tabou.
Dans le canton de Neuchâtel, Yann Huguelit, président de l’interprofession locale, estime que la restructuration du vignoble n’est plus un tabou. Il pointe l’intérêt économique d’une parcelle plus réduite qui peut permettre au vigneron de viser une rétribution équivalente, tout en maîtrisant les coûts et l’effort fourni.
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Réponses et pistes au niveau fédéral
Sur le plan fédéral, un groupe de travail s’est réuni pour la première fois en août avec le Conseil fédéral. Ses axes privilégient le renforcement de la promotion des vins suisses et la gestion des contingents d’importation de vins étrangers, afin de favoriser l’achat de produits suisses parallèlement à l’offre internationale. Le groupe préconise aussi des aides directes destinées aux professionnels qui ne parviennent pas à écouler leur raisin, afin d’assurer une transition et le maintien de la production.
Une série d’interventions parlementaires, touchant une diversité de formations politiques, est en cours ou en attente de réponse. Elles visent principalement à protéger les vins suisses face à la concurrence étrangère.
Un millésime 2025 au milieu d’un contexte difficile
Face à ces défis, Yann Huguelit rappelle que la viticulture suisse doit évoluer sur le moyen ou le court terme, sans être menacée à long terme. Il propose de miser sur la valeur ajoutée des vins suisses, de limiter la production de gros volumes et de cibler des consommateurs prêts à payer un prix premium pour une bouteille suisse.
Points clés et perspectives
Le secteur reste vigilant : les signes de crise sur les ventes et la compétitivité incitent à des ajustements structurels, des stratégies de promotion renforcées et des réflexions sur le dimensionnement du vignoble. Les discussions au niveau fédéral et les discussions internes des interprofessions continueront d’alimenter le débat sur les solutions à privilégier pour préserver l’équilibre économique des exploitations tout en protégeant l’image et la qualité du vin suisse.